ASSURANCE-CHÔMAGE ET CORONAVIRUS
La propagation du virus Covid-19 risque d’avoir de sérieuses conséquences sur l’emploi :
- de nombreux secteurs d’activité sont à l’arrêt ;
- 2 millions de salariés en CDI pourraient être placés en activité partielle ;
- les 4 millions de précaires pourraient voir leur contrat annulé ou reporté ;
- les demandeurs d’emploi en fin de droit ne pourront retrouver d’emploi ;
- les intermittents subissent des annulations de cachets en cascade.
En clair : beaucoup de personnes vont se retrouver privées d’emploi. Les plus chanceuses auront droit au chômage, d’autres au RSA et certaines… à rien. Cette situation risque de plonger des millions de personnes dans la précarité et la pauvreté.
La ministre du Travail a annoncé des mesures (bien qu’insuffisantes) visant à protéger les précaires et les privés d’emploi :
- d’abord, accorder la poursuite de l’indemnisation des chômeurs en fin de droit, afin d’éviter qu’ils ne tombent dans les minima sociaux. La mise en œuvre de cette mesure a été confirmée à plusieurs reprises par la ministre, même si pour l’instant aucun décret ou projet de loi ne l’a concrétisée – ce qui laisse beaucoup de questions sans réponse. Dans un premier temps, les demandeurs d’emploi en fin de droits au mois de mars bénéficieraient d’une prolongation en avril ;
- ensuite, le report de l’entrée en vigueur des mesures issues de la réforme de l’Assurance-chômage. Là aussi, un décret paraîtra prochainement.
Pour rappel, un décret du 26 juillet dernier a bouleversé les règles applicables à l’Assurance-chômage, avec des conséquences désastreuses : l’ensemble de ces mesures réduirait totalement ou partiellement les droits d’un indemnisé sur deux (soit 1,3 million de personnes).
La première série de mesures est entrée en vigueur au 1er novembre dernier, et notamment le rehaussement du seuil d’ouverture des droits, qui est passé de 4 mois sur 28 à 6 mois sur 24. On estime que 250 000 personnes n’ouvriront pas de droits à l’Assurance-chômage en raison du relèvement de ce seuil.
La deuxième série de mesures est censée entrer en vigueur au 1er avril prochain. La ministre du Travail a annoncés on report au 1er septembre prochain, pour éviter qu’au durcissement des règles d’Assurance-chômage s’ajoutent les conséquences négatives de la propagation du Covid-19.
À juste titre, car la mesure programmée pour le 1er avril consiste en la modification des règles de calcul du salaire journalier de référence (qui permet de calculer le montant mensuel de l’allocation).
Ces nouvelles règles de calcul auraient des conséquences graves sur les plus précaires : 450 000 indemnisés verraient leur allocation baisser de 20 % en moyenne. Et plus les périodes de travail seraient espacées, plus l’allocation serait amenée à baisser. Le nouveau mode de calcul diviserait l’allocation des plus précaires par 2, 3, voire 4…
RETOUR SUR LA RÉGLEMENTATION D’ASSURANCE-CHÔMAGE
QUI A DROIT À L’ASSURANCECHÔMAGE ?
Les personnes répondant aux conditions suivantes :
- justifier d’une période de travail salarié de 130 jours ou 910 heures au cours des 24 derniers mois (ou 36 si le demandeur d’emploi a au moins 53 ans) ;
- être à la recherche effective et permanente d’un emploi ou accomplir une action de formation ;
- ne pas avoir quitté volontairement la dernière activité professionnelle salariée (sauf cas de démissions légitimes et certaines ruptures de la période d’essai).
ATTENTION : le contrat de travail des salariés en activité partielle (ou chômage technique) est simplement suspendu, il n’est pas rompu. Il faut attendre une réelle rupture du contrat de travail (démission, rupture d’un commun accord, licenciement) pour pouvoir s’inscrire comme demandeur d’emploi.
COMMENT SONT CALCULÉES LES ALLOCATIONS ?
Le décret du 26 juillet 2019 a modifié les règles de calcul des allocations d’Assurance-chômage.
Ces nouvelles règles, censées entrer en vigueur au 1er avril 2020, ont été reportées au 1er septembre prochain, par un décret qui devrait paraître prochainement.
Par conséquent, les règles actuelles restent applicables, à savoir que l’allocation correspond à un montant entre 57 et 75 % du salaire journalier de référence.
PENDANT COMBIEN DE TEMPS ?
Tout dépend des droits à chômage acquis. Cela dit, pour les personnes qui seraient en fin de droits en mars, un mois d’indemnisation supplémentaire devrait être accordé. En effet, la loi « Mesures d’urgence sanitaires » a habilité le gouvernement à prendre un certain nombre de mesures par ordonnance, notamment en matière d’Assurance-chômage. Le 25 mars, un projet d’ordonnance relative à la prolongation des droits à chômage pour les demandeurs d’emploi en fin de droits a été rendu public.
Cette ordonnance, très courte, apporte quelques précisions, mais elle renvoie surtout la mise en œuvre de ses mesures à un arrêté et un décret. Les précisions portent sur :
- les demandeurs d’emploi concernés par la prolongation de leurs droits : tous les demandeurs d’emploi (saisonniers, intérimaires, intermittents…) dont la fin de droits se situe entre le 12 mars et une date qui sera fixée par arrêté (mais au plus tard le 31 juillet) ;
- les allocations concernées par la prolongation : allocation de retour à l’emploi (ARE), allocation de solidarité spécifique (ASS), allocation à destination de certains agents de la fonction publique, allocation des intermittents ;
- la durée de la prolongation n’est pas précisée : il faudra attendre la publication d’un arrêté pour en savoir plus.
Le décret précisera les modalités d’application de ces mesures et la limite que la prolongation des droits ne pourra excéder.
Une forme de droits rechargeables serait remise en place. À savoir, si une personne n’a plus de droits à chômage, qu’elle a retravaillé mais pas assez pour rouvrir des droits (donc moins de six mois), elle pourrait quand même rallonger sa période d’indemnisation. Cette mesure a simplement été annoncée et il faudra attendre la publication d’un texte pour être certain qu’elle entrera en vigueur.
DOIS-JE QUAND MÊME RÉACTUALISER MON INSCRIPTION À PÔLE EMPLOI ?
Oui! La prolongation pour les personnes en fin de droits ne se fera pas automatiquement et suppose que le demandeur d’emploi se réactualise, comme tous les mois.
Cela peut être problématique pour un certain nombre de demandeurs d’emploi. En effet, tout ceux qui n’ont pas accès à internet se réactualisent en agence, en temps normal. Les agences étant fermées par mesure de sécurité, les réactualisations ne peuvent se faire que par internet et éventuellement par téléphone. On peut donc craindre que certains d’entre eux ne puissent pas se réactualiser.
JE NE PEUX PAS RECHERCHER D’EMPLOI CAR JE SUIS CONFINÉ CHEZ MOI / OCCUPÉ À GARDER MES ENFANTS / LES ENTREPRISES DE MON SECTEUR ONT STOPPÉ LES RECRUTEMENTS EN CE MOMENT. EST-CE QUE JE RISQUE D’ÊTRE SANCTIONNÉ ?
Pôle emploi a annoncé suspendre tous les contrôles de la recherche d’emploi pendant la durée du confinement, afin de ne pas pénaliser les personnes qui seraient dans l’impossibilité réelle de chercher un emploi. Cela signifie qu’aucun demandeur d’emploi ne pourra être radié ou sanctionné sur ces motifs.
SI J’AI PERDU UN CONTRAT EN RAISON DU CORONAVIRUS ET DES MESURES DE CONFINEMENT?
Nombreuses sont les personnes dont le contrat de travail n’a pas été renouvelé (lorsqu’il avait déjà
commencé) ou a été annulé (lorsque son exécution n’avait pas encore débuté, voir fiche rupture du contrat). Tout cela en raison du virus Covid-19 et de ses conséquences sur l’économie.
La CGT a demandé à ce que les contrats qui étaient déjà prévus et qui ont été annulés pour ces raisons soient tout de même indemnisés. La ministre du Travail n’a pas donné suite à notre demande.
Par conséquent, actuellement, rien de spécial n’est prévu pour les personnes placées dans ce cas de figure. Les règles « normales d’assurance chômage » leurs sont appliquées, à savoir remplir les conditions détaillées dans le 1er paragraphe.
LE CAS PARTICULIER DES INTERMITTENTS
Les intermittents du spectacle ont été particulièrement impactés par la propagation du virus Covid-19. Et pour cause : très rapidement, toutes les représentations ont été annulées pour des raisons de sécurité.
Plusieurs mesures sont envisagées pour les protéger :
- ils sont éligibles au mois d’indemnisation chômage supplémentaire pour les personnes en fin de droits ;
- ils bénéficieraient d’une sorte de période « blanche » courant du 15 mars à la fin du confinement pour le calcul de leur période de référence et le versement de leurs indemnités chômage ;
- Un fonds de 23,5 millions d’euros serait mis en place dans le but de verser des aides aux entreprises du monde de la culture.
ET SI JE NE SUIS NI EN ACTIVITÉ PARTIELLE, NI INDEMNISÉ PAR PÔLE EMPLOI ?
Très bonne question ! Nombre de personnes vont se retrouver dans ce cas de figure. L’activité partielle touche essentiellement les salariés embauchés en CDI (pour les contrats précaires, les entreprises vont sans doute attendre la fin du contrat plutôt que de dépenser de l’argent pour assurer un certain niveau de rémunération à ces travailleurs en CDD ou en intérim).
Pour bénéficier du chômage, il faut remplir les conditions précédemment mentionnées, notamment celle de durée d’affiliation de 6 mois. Or, cette condition s’avère difficile à remplir pour un certain nombre de travailleurs et notamment les jeunes.
Lorsque l’on ne peut prétendre à aucun de ces dispositifs, on tombe dans les minima sociaux et notamment le RSA. Qui pour rappel, n’est pas ouvert aux moins de 25 ans (ou alors seulement à condition d’avoir travaillé pendant deux ans)…
La conséquence ? Des groupes entiers de citoyens sont laissés pour compte : les jeunes, mais aussi les sans-papiers et les SDF.